Écoutez la version audio de cet article :

J’ai choisi ce titre énigmatique pour parler d’un fait qui ne l’est absolument pas : la sortie du 500E numéro de la revue du même nom : S!lence.

J’aime la poésie de ce titre. Nous est-il demandé de nous taire, de revenir à l’essentiel, d’écouter, de retrouver un peu de la paix goûtée dans l’absence des bruits de la ville ou de prêter enfin attention à la nature et aux dominés qui n’ont pas la parole ? C’est un peu tout cela, la revue S!lence, ou bien j’extrapole peut-être…

« Au départ, les personnes qui ont créé la revue avaient été inspirées par une bande dessinée qui venait de paraître qui s’appelait Silence. Et puis aussi, c’était suite à l’arrêt de la revue écologiste « La gueule ouverte », comme une sorte de petit clin d’œil. »

J’extrapolais mais c’est au moins un titre qui a le pouvoir de faire rêver… A mon micro, Guillaume Gamblin, salarié de l’association qui s’occupe d’éditer cette revue.

« S!lence c’est une revue et une association, qui est basée à Lyon, mais qui s’étend sur l’ensemble du territoire français et au-delà. Et c’est une revue écologiste mensuelle, qui existe depuis bientôt 40 ans, et qui croise de nombreuses thématiques autour de l’écologie. »

Si je vous parle, à raison, après chaque épisode du podcast, de la revue Alternatives Non-violentes, la plus ancienne qui soit consacrée à la non-violence, j’ai donc découvert S!lence, qui explore les alternatives à notre modèle écologique et social, avec comme principe fondateur : la non-violence. Nous pouvons ainsi lire sur leur site internet : « S!lence fait le choix de la non-violence comme stratégie et comme éthique d’action, pour agir sans (se) détruire. La non-violence comme résistance aux logiques guerrières, comme force de non-coopération face aux injustices établies, comme recherche de cohérence entre les fins et les moyens, comme apprentissage de la coopération plutôt que de la compétition. ».

Il est également mis à disposition  gratuitement sur leur site 50 articles portant sur la non-violence, sous un titre on ne peut plus en phase avec ce podcast :

 

« la non-violence, une force pour agir »

 

Pour fêter la sortie de leur 500ème numéro, j’ai eu envie de me pencher sur le contenu de cette revue et sur la place qu’occupe l’approche pratique et philosophique de la non-violence dans la ligne éditoriale d’abord mais aussi dans l’ organisation même de l’association qui publie la revue. Écoutons à nouveau Guillaume Gamblin:

« On défend une ligne éditoriale qui peut être résumée par les trois petits mots qu’il y a sous le titre de la revue : « écologie, alternatives et non-violence ». « L’écologie » parce que c’est vraiment notre ADN depuis le départ, avant que ça devienne à la mode. Une revue antinucléaire et très militante, autour aussi de la décroissance, notamment. « Alternatives » parce que pour nous c’est important de mettre en avant les lieux où des personnes expérimentent d’autres manières de vivre et de travailler etc. Et puis « non-violence » parce que ça avait vraiment de l’importance d’affirmer ce choix dès le départ. Autant dans les moyens d’action pour transformer la société, vers l’écologie, vers plus de justice sociale. Et plus globalement aussi face aux guerres, un esprit de résistance à la guerre et au militarisme. Et également dans nos manières de faire, dans nos manières d’organiser notre travail, notre vie quotidienne à l’association, avec un fonctionnement le plus horizontal possible, une certaine autogestion et un esprit de bienveillance qu’on cherche à avoir entre nous et avec nos partenaires, avec les personnes avec qui on travaille au quotidien. »

Voilà un point qui m’a en effet interpellée : l’importance accordée au bien-être de chacun et chacune au sein de S!lence. L’intention d’explorer des alternatives à la domination et à la hiérarchie est présente non seulement dans les sujets abordés dans leurs articles mais aussi dans le fonctionnement propre de l’association, avec par exemple des temps de travail réduits dans un esprit de décroissance. Bénévoles et salariés s’inspirent des méthodes de la communication non-violente, du consensus ou de la sociocratie, suivant le moment et les sensibilités des unes et des autres.

Alors, c’est comment d’être salarié à S!lence?

« Je trouve ça très plaisant, parce qu’il n’y a pas la sensation de rapports de domination, de hiérarchie très forts, qui s’imposent à nous. Quand il y a des conflits, on essaye de communiquer au mieux, de poser les choses sur la table. Il y a vraiment une volonté de mettre ça au cœur du fonctionnement, de l’esprit de l’association. On essaye de faire attention à la répartition de la parole dans les réunions, entre nous, on essaye d’avoir la plus grande mixité au niveau du fonctionnement. Et aussi le choix de l’écologie, le choix de la décroissance dans le quotidien a des implications anticoloniales parce que c’est ne pas exploiter des ressources inéquitables. A chaque petit choix qui se pose à nous, on met un certain nombre de valeurs dessus. Il y a l’écologie, donc le choix du papier, le choix de l’encre, le choix de l’imprimeur aussi : on a choisi un des rares dans notre région qui ne fait pas les trois huit, pour les conditions sociales de travail des employés. On a réussi récemment à ne plus travailler avec Paypal aussi, qui est un système vraiment inéquitable par rapport aux données ».  

Revue participative, S!lence vit grâce à un grand engagement de ses bénévoles, une façon pour ceux-ci, celles-ci, de militer en participant au fonctionnement de l’association.  Ce sont elles et eux qui signent également une grande partie des articles du journal.

Quant à la non-violence, Guillaume le dit, il s’agit d’un choix assumé et militant :  

«  Ça a commencé avec le soutien à l’objection de conscience. Dès notre premier numéro on avait un encart en lien avec le MAN (Mouvement pour une Alternative Non-violente), sur comment ne pas payer la part de ses impôts qui va aux sous-marins nucléaires, et le reverser à des caisses de résistance. Et puis on a beaucoup soutenu les mouvements de désobéissance civile, autour des OGM, de l’antipub, de l’antinucléaire. Il y avait aussi à se positionner par rapport à des acteurs qui font le choix de la violence dans l’action. Et nous, on est vraiment persuadé que c’est un choix qui est contre-productif. Il y a aussi le fait que les modes d’action violents sont souvent dans une forme de continuité avec le militarisme, contre lequel on se bat. Le militarisme, c’est vraiment un des modes de domination qui s’articule fortement avec la domination capitaliste, patriarcale, etc. Et on pense qu’il faut arriver à les analyser ensemble, et à lutter ensemble contre ces différentes dimensions, pour que ce soit plus efficace et plus pertinent. On a publié l’année dernière une grande affiche qui présente des grandes dates de la désobéissance civile. Ca a été un grand travail collectif pour nous, pour promouvoir ce mode d’action dans la société. » 

 

Et oui, pas de compétition mais de la coopération entre les deux revues, S!lence et Alternatives non-violentes, c’est aussi ça la cohérence entre les idées et les actes.

Et enfin, ce numéro spécial invite l’imaginaire à sa table pour rêver encore à ce que pourrait être un demain désirable.

Une superbe affiche, en effet, réalisée en partenariat avec l’association Non-violence XXI.

 

 

C’est donc l’anniversaire de S!lence.

Que nous réserve ce 500ème numéro ?

« Alors, c’est un numéro un peu exceptionnel. Parce qu’il faut s’imaginer S!lence comme une revue papier de 48 pages format A4 qui est essentiellement en noir et blanc, issue d’une longue histoire militante, avec un dossier thématique à chaque fois. Et là c’est un numéro qui est plus long que d’habitude, qui est quasiment tout en couleur et dans lequel on a choisi de mettre en avant les différentes dimensions de la revue. Donc une dimension rétrospective, en reparlant de l’histoire de l’écologie d’un point de vue humain, vécu et militant, et de l’histoire de la revue, de sa ligne éditoriale. Le côté lutte, luttes autour du climat, luttes antinucléaires… Et puis une réflexion autour du féminisme et de la non-violence, notamment un article qu’on a publié en partenariat avec une autre revue non-violente, qui s’appelle Alternatives non-violentes. »

L’un des objectifs de S!lence :

résister à la résignation!

 

J’ai donc demandé un petit conseil anti-morosité à Guillaume parce qu’on en a bien besoin  :

« Rester attentif à toutes les expériences alternatives qui se créent de partout et tout le temps. Elles passent complètement sous les radars des grands médias. Mais quand on arrive à pouvoir être au courant de tout ça, ça donne beaucoup de force, pour continuer à avancer. »

 

Vous pouvez vous procurer S!lence en commandant sur  « silencelarevue.net« , ou en allant voir sur la carte en ligne si l’un des 180 lieux de dépôt se trouve près de chez vous.

Belle lecture aux curieux et curieuses de cette 500ème édition spéciale, intitulée « Ecouter, regarder, raconter », encore une manière de rappeler que « le silence est d’or » car nécessaire avant de prendre la parole et d’agir.  

 

Merci à Guillaume Gamblin, de la revue Silence.
Article réalisé avec l’aide d’Irène Monden, stagiaire à La Force de la Non-violence.

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